la femme renarde- extrait de Perle

…..

….Alanik me fit griller des pimpeneaux avec des petits oignons frais dans sa cheminée sur un feu de motte qui crépitait .  J’étais sur des charbons ardents, assise par terre en tailleur face à la cheminée,  juste vêtue de sa grande chemise XXL en lin mal boutonnée qui grattait la peau tendre de mes seins . A la fin du festin il décida me faire la lecture alors que je lui proposai de se régaler d’une autre bouilleture qui mijotait dans ma petite marmite depuis le début du repas, tant et si bien qu’il dut me ligoter les mains attachées aux pieds de son fauteuil pour que je ne les loge pas entre mes cuisses. Il me lut jusqu’au soir, d’une  seule traite, l’histoire de La femme changée en renarde. Je ne sus si  le choix du livre révélait la perversité sournoise d’Alanik mais cette femme qui se couvrit subitement d’un pelage  et se dota d’oreilles et de queue de renarde m’impressionna épouvantablement. Mi femme mi bête, cette métamorphose éprouvait  cruellement la solidité du lien d’amour qui la liait à son mari épouvanté par cet abêtissement.  L’instant que je préférai fut celui où Silvia  commença à basculer irrémédiablement vers l’animalité tout en conservant l’expression de son regard de femme. Je repoussais l’idée facile d’interpréter ce récit comme une description phallocrate de la féminité bien que Garnett aurait tout aussi bien choisir de transformer le mari en  homme renard. Cette lecture me troubla tant  qu’il me sembla oublier les tourments de ma contamination lubrique. Alanik me flattait la tête en lisant. Silvia avait disparu après avoir dévoré l’oiseau et fichu plein d’entrailles sanglantes dans la chambre à coucher, je jubilais là…sans doute cela faisait-il écho à mon inoculation sauvage.  Quant au mari, désespéré mais toujours amoureux, il  poursuivait sa quête d’absolu ; j’aimais cela aussi, qu’il cherche à surpasser son dégoût et à faire taire sa  conscience. Quand  il la découvrit pleine il dut l’imaginer se faire couvrir par un  grand mâle roux qui la grimpait comme un chien avec vigueur parce qu’il savait bien que  les renards sont insatiables,  il dut aussi visualiser les yeux de sa douce femme agrandis sous l’assaut de la bite toute rouge et entendre ses gémissements de femelle. Il aurait aimé dire chienne sans doute. Il batailla contre sa voix intérieure outrée  et se persuada que  sa femme ne se livrait pas  à la zoophilie, elle était devenue une renarde même si elle conservait son regard humain. Elle baisait donc en renarde, voilà tout. Je devinais  que Silvia allait mourir dévorée par les chiens avant qu’Alanik ne termine le livre et j’ai ressenti du plaisir quand elle expira à moitié dépecée dans les bras de son époux dévasté de chagrin. Un  extrême plaisir bestial. Une boule toute chaude sous le nombril.  Je ne  me délectais  non pas de la sanction mais du jusqu’au boutisme de Silvia renarde. J’en ai pleuré, j’étais mouillée de partout.

Extrait  de   mon roman Perle, édité chez Hors Collection . 2011 – disponible aussi en format numérique

4 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. anne dit :

    @ Lili : le livre évoqué dans l’extrait s’appelle réellement « la femme changée en renarde » de Garnett, (traduit de l’anglais)

    @ Christophe : bonne fête ! ce jour est le vôtre et j’ai justement pensé à vous.
    Vous avez raison pour les larmes. Pour le reste, cette histoire de femme renarde n’en finit pas de m’intriguer, oui, j’y réfléchis toujours, (m’) interroge et ne trouve jamais de réponse. Mais enfin…

  2. Chr. Borhen dit :

    « Alanik me flattait la tête en lisant. »

    Cet Alanik, outre sa bienveillance et sa bonté, est sans doute très malin, il a aussi un petit côté renard on dirait.

    (Cet extrait me fut très agréable à lire, mais pas que, dans la mesure où il a ouvert la porte sur une multitude de sujets à réfléchir. Enfin bref.)

    (Ah oui, les derniers mots (affichés) du texte (dé)montrent, si besoin était, que même (et surtout) les larmes peuvent mouiller de la tête aux pieds ; c’est une manière qui en vaut mille autres, ma foi, pour éteindre un feu quand celui-ci cesse d’éclairer pour aveugler.)

  3. lili dit :

    ps : c’est quoi des pimpeneaux ?

  4. lili dit :

    Dérangeant mais troublant. Il n’empêche, on a envie de la caresser cette jolie renarde/femme. Vous avez les références du livre ?

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