En ces temps de grâce et de sainte passion, j’ai le fervent désir de faire mon chemin de croix, cheminer jusqu’à vous en renonçant à tout orgueil. Voyez mon cher amour, comme je livre mon corps tout entier à cette humble et ardente cérémonie. En toute conscience , quatorze fois je ferais halte afin de méditer sur mon engagement dans la foi de nous. Soumettre ma chair à la douleur exquise de l’ivresse et de l’extase, tomber à genoux la croupe offerte et flagellée, donnée à Pierre ou à Paul, sans m’offenser, pour l’amour de vous, de nous. Me relever et tomber encore. Ramper et vous baiser les pieds, une pluie dorée trempe mon visage, de mes beaux cheveux j’essuie vos pieds, la lumière m’inonde. M’humilier face à vous pour purifier mon âme. Me relever encore. Je ne vous mens pas mon amour, je jubile de cheminer ainsi jusqu’à la croix et de souffrir une peine qui ne m’était pas due. L’infernale ascèse m ‘ébranle, je coule, liquéfiée. Condamnez moi aux supplices éternels. Mes parfums sont pour vous et c’est vous qui recevrez mes soupirs au pied de la croix. Sur mon chemin, on me débraille et je reçois injures et crachats qui n’atteignent pas mon cœur. Moi et vous , savons, seuls. Livrée aux hommes sous vos yeux aux aguets, mes coupes sont pleines et débordent, laiteuses et bourbeuses entre mes lèvres, mes plis et replis vultueux. Si vous avez soif, venez à moi vous désaltérer me dites-vous, tendu vers le ciel. Je me relève et vous bois. Et lèche, et cautérise vos blessures. Et marche encore, extatique, vous en bouche.
Ce sont vos mains aimées qui me lient les pieds et les poignets au X de la croix, de dos, exposée aux regards concupiscents, mon œil noir béant, écarquillé sur leur perverse contemplation ; vos mains encore qui cinglent ce qui raidit votre membre et le leur et qui vous obsède, ces rondeurs trop bien fendues que vous leur offrez en réceptacle. S’écoulent alors entre mes cuisses ma douleur et ma joie, mes cris, mes complaintes et mes jouissances. Jusqu’à la damnation et l’épuisement. Jusqu’à la rédemption, quand vos bras m’enlacent et votre bouche baise ma bouche purifiée.
Je n’aurai pas osé un tel mélange, mais vous réussissez avec brio!
Oui Anne, et là-dessus nous aurons à coeur de (re)lire « Thérèse philosophe » d’un certain Boyer d’Argens (dit-on).
Christophe, parfois le désir est, oui, un chemin de croix….
Plus généralement, si l’on lit attentivement les textes religieux, l’extase divine est parfois orgasmique jusque dans la douleur
Le sm a également beaucoup emprunté aux pratiques religieuses
la simple attitude de s’agenouiller, par ex, ne se départira jamais de cette connotation religieuse, même dans les ébats intimes
Marier « désir » et « chemin de croix », il fallait oser.
Texte magnifique, même Satan ferait un tel chemin de croix 😦
elle est très bien cette aquarellle ….
Pâques vous inspire… ;))